IA : « un narratif de déstabilisation poussé par les États-Unis ».

13 09 2025
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Savez-vous ma chère lectrice, mon cher lecteur, que les États-Unis pratiquent la désinformation à grande échelle ?
 
« Il y a un narratif de déstabilisation poussé par les états-unis »
 
Ces méchants anglo-saxons voudraient nous faire croire que nous sommes mauvais en nouvelles technologies et complètement idiots en matière d’intelligence artificielle.
 

« Ensuite ils exportent leur technologie chez nous et c’est d’autant plus problématique que l’on est à un point d’inflexion et si nous on n’intervient pas, l’intelligence artificielle va encore augmenter cette dépendance économique. 

 
[…]
 
Les Américains n’ont pas intérêt à ce que l’on se réunisse à ce qu’une entreprise française travaille avec une entreprise hollandaise puisque ça ça veut dire que c’est un vrai espace économique unifié et que du coup on a une chance sur la guerre de l’échelle. »

 
Bon.
 
Rien de nouveau sous le soleil des méchants complotistes qui voient le mal partout.
 
J’imagine déjà Le Monde et France Info sortir fébrilement leurs claviers de fact-checker pour dénoncer ces propos dignes des pires heures blablabla… nauséabonds ouioui … Bruns-rouges… d’accord’accord… Et crier, évidemment, à la censure immédiate, totale et sans retour.
 
Il n’en sera rien pourtant : Ces propos nous viennent directement d’un temple revendiqué de la correction politique, du wokisme en étendard, de la bien-pensance en bandoulière.
 
Je les ai entendus sur TMC (chaîne du groupe TF1), dans l’émission Quotidien animée par Yann Barthès, rare personnalité qui revendique publiquement le politiquement correct. 

Mais alors, que se passe-t-il mon cher lecteur ? Nos zélites zélotes passeraient-elle enfin le rubicond ?

 

Serait-ce le premier pas vers une souveraineté retrouvée ? Allons-nous enfin pouvoir investir dans les technologies européennes !? 
Yann Barthès et son équipe de choc, donc, interrogeaient hier Arthur Mensch, cofondateur de Mistral AI au sujet de sa récente levée de fond.
 
Ils ont sorti le grand jeu, présenté Mense comme un « génie de l’IA » avec une grande nouvelle à annoncer : la pépite française de l’Intelligence Artificielle, Mistral AI, a levé 1,7 milliard d’euros, essentiellement auprès d’un autre champion européen de la tech : ASML.
 
ASML est une de ces entreprises très bizarre qui prend la lumière récemment : Il fabrique les machines à 400 millions de dollars qui permettent de graver les fameuses puces spécialisées dans l’IA. 
 
Regardez bien cher lecteur naître, devant vos yeux ébahis, un vrai espace économique unifié… LE coup de force qui va permettre de donner une chance à l’Europe dans la guerre de l’échelle… Nous allons ENFIN pouvoir nous battre à armes égales avec les Américains !
 
Je ris. 
 
Oh, cela viendra et sans doute cette mesquinerie y participe-t-elle… mais pour le moment, oui, nous en sommes encore au stade de la mesquinerie, du foutage de gueule même et dans les grandes largeurs façon Grand Rex .
 
Car au fond ce qui se passe sous nos yeux, c’est essentiellement l’alliance de 2 groupes américains sous drapeaux français et hollandais afin de mieux capter les subventions, aides et épargnes européennes.

Commençons par le plus simple :

ASML

ASML nous est présentée comme une société des Pays-Bas. Elle est effectivement de droit néerlandais et ce n’est pas tout à fait anodin mais est-ce bien cela qui compte ?
 
Oui évidemment, cela fait des emplois aux Pays-Bas, de l’activité économique. La société est également régie par le droit néerlandais qui se trouve, quel heureux hasard, être l’un des plus souples et généreux d’Europe, en particulier envers les actionnaires.
 
Oui mais voilà, en terme de souveraineté, ce qui compte, c’est le propriétaire, c’est l’actionnaire, SURTOUT dans le cadre européen de Bruxelles qui a émasculé les États nationaux depuis longtemps, à commencer par leur capacité à tenir tête aux géants américains. 
 
Et les 5 principaux actionnaires d’ASML sont américains, à commencer par les sempiternels BlackRock et Vanguard évidemment.
 
Cela signifie qu’une décision aussi importante et stratégique qu’un investissement de 1,5 milliard d’euro a évidemment été approuvée par les actionnaires donc par les Américains… Pour le dire autrement, le PDG (français) d’ASML n’aurait jamais pris le risque de déplaire à ses actionnaires.  Il est vraiment sympa Oncle Sam de nous laisser former cette alliance si stratégique alors même qu’il fait de la méchante désinformation et propage des narratifs de déstabilisations.
 
Allez, ces animateurs de TV ne sont pas à une contradiction près.
 
Mais à bien y regarder, même Mistral n’a pas grand chose de français, en tout cas dans sa structure décisionnaire.
 
Mistral AI 
Lors de sa création, Mistral a d’abord été financé par le fonds américain Lightspeed Venture Partners, Andreessen  Eric Schmidt, l’ancien patron de Google et les très atlantistes Xavier Niel et Rodolphe Saadé qui ont des intérêts ou visées importantes outre-atlantiques.
 
Notez d’ailleurs qu’Arthur Mensch était chez Google avant de créer Mistral avec, donc, la bénédiction d’un dirigeant-clé du groupe.
 
Mistral a également un partenariat technologique avec Microsoft et avec cet investissement d’ASML, la majorité du capital de Mistral est désormais sous contrôle américain… Donc Mistral l’est.
 
Là encore, même sans connaître les pactes d’actionnaires de Mistral, il aurait été quasiment impossible pour Mistral de faire rentrer ASML sans l’accord exprès des actionnaires historiques américains
 
Mais alors pourquoi tous ces investisseurs et actionnaires favoriseraient-ils leur propre concurrence ?

 
Tout d’abord, ils ne le font pas vraiment. 
 
J’ai écrit en mai dernier que la guerre de l’IA ne se menait déjà plus au niveau des modèles ni même de la capacité à les entraîner avec des milliards de milliards de données.
 
Non, l’enjeu désormais, c’est la puissance de calcul pour les faire tourner pour les utilisateurs. C’est d’ailleurs pour cela que la grande majorité des modèles sont en accès libre. Il n’y plus d’enjeu vous dis-je.
 
D’ailleurs, quand Yann Barthès demande à Arthur Mensch ce que Mistral fait mieux que ses concurrents, il répond… Que son modèle est « plus sympa ». Ah.
 
Au moment où j’écris ces lignes, OpenAI, l’éditeur de ChatGPT,  vient d’annoncer un contrat titanesque à 300 MILLIARDS de dollars avec Oracle pour fournir de la puissance de calcul équivalente de 4,5 gigawatts soit des serveurs derniers cris alimentés en permanence par… 4 réacteurs nucléaire !
 
Si personnes ne sait encore comment Sam Altman va réussir à financer ce gouffre ou comment Oracle va aligner la puissance de calcul, nous n’avons en revanche pas de mal à concevoir le besoin pour ChatGPT qui compte déjà plus de 700 millions d’utilisateurs hebdomadaires, utilisateurs toujours plus nombreux et toujours plus gourmands en requêtes. 
 
Non, vraiment, nous sommes à la ramasse à nous esbaudir ainsi des succès de Mistral AI.
 
Bien sûr, ce n’est pas désagréable ni complètement inutile d’avoir un acteur « français » de l’IA mais nous sommes très TRÈS loin du passage à l’échelle pour rattraper les Américains. 
 
Les Américains se comportent en colonisateurs qui extraient la richesse… Encouragés par nos « élites »
En revanche, là où Mistral et ASML sont très très bien positionnées, c’est pour capter des subventions directement et indirectement, drainer l’épargne européenne, notre fameuse épargne si abondante, mettre la main sur des ingénieurs sans avoir à les faire traverser l’Atlantique pour les payer aux tarifs de la Silicon Valley…
 
En fait, nos partenaires américains se comportent avec nous comme la colonie que nous sommes pour en extraire, par tout moyen, toute la richesse possible, y compris par ce genre de transaction qui semblait les desservir de prime abord.
 
Bien sûr, je me réjouis qu’il y ait un peu de savoir-faire en matière d’IA sur notre sol, bien sûr il y a et il y aura encore des retombées positives pour l’économie française mais je peux vous assurer que notre indépendance des États-Unis NE viendra PAS de Mistral ni d’ASML qui sont déjà sous coupe réglée. 
 
Nous ne sommes ABSOLUMENT pas en capacité, en France, de faire émerger un champion comme Mistral en 3 ans. Ce champion n’est pas fabriqué par nous et dès lors, pas vraiment pour nous. Il n’y a d’ailleurs pas de nous qui tienne pour les Niel et Saadé qui ont investi dans Mistral.
 
Le processus pour nous relever sera bien plus pénible, fastidieux et profond. Il a fallu une vingtaine d’année à la Russie pour retrouver des couleurs mais elle a été « aidée » par l’ostracisation occidentale.
 
À votre bonne fortune,
 
Guy de La Fortelle
 
PS : Vous avez vu les besoins énergétiques colossaux qu’exige l’IA, Elon Musk a d’ailleurs dû installé 4 turbines à gaz pour alimenté son tout dernier super-calculateur « colossus », le plus puissant jamais conçu. 
 
Dans toute économie, l’énergie est la question centrale et celle du pétrole revient à grande vitesse en ce moment avec l’arrivée du pic de Hubbert des pétroles de schistes américains.
 
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