Une simple convention

13 07 2019
Partager l'article

Mon cher lecteur,
 
Une monnaie est une convention.
  
Elle n’a pas d’autre existence que dans nos têtes. Elle n’a pas d’autre valeur que celle, arbitraire, que nous lui accordons.  
 
Au moyen-âge, le poivre, importé à prix d’or d’extrême-orient, valait son poids d’or. Il était devenu une pseudo-monnaie en Europe. Il était courant d’évaluer la fortune d’un seigneur en kilos de poivre. D’ailleurs les espèces avec lesquelles nous payons et les épices ont la même racine latine species
 
Cela aurait bien fait rire tous les habitants de Zanzibar à Pondicherry où le poivre poussait en abondance et ne valait rien. Ils devaient être bien étonnés d’échanger quelques kilos d’épices bon-marché contre de fabuleux colliers de verres colorés, des miroirs, couteaux, paires de ciseaux et autre produits manufacturés jugés de bien plus grande valeur que quelques sacs de poivres.
 
De nos jours, il ne vous viendrait sans doute pas à l’idée de payer vos courses en cigarettes ou en sacs de billes qui sont pourtant des pseudo-monnaies dans les prisons et les cours de récrées.
 
Vous n’imaginez sans-doute pas acheter une maison avec une « pièce de monnaie » pesant plusieurs tonnes. C’est pourtant l’usage à Yap, petite île du Pacifique, encore aujourd’hui.
 
Or, poivre, cigarettes, billes, blocs de pierre, coquillages sont des monnaies de grande valeur pour les uns, des matières grossières pour les autres.
 
L’argent n’a de valeur que celle que nous lui accordons collectivement à un moment et un endroit donné.
 
Vous pouvez bien imprimer votre propre monnaie demain, si personne d’autre que vous ne l’accepte comme monnaie, cela ne vous servira guère.
 
Mais cela marche dans les deux sens : si vous avez à vendre quelque chose de très désirable, de l’eau dans le désert, ou du grain en pleine famine, alors vous pourrez sans problème créer votre propre monnaie et obliger tout le monde à l’utiliser pour acheter votre bien.
 
Imaginez que vous avez la seule source d’eau d’une région aride. Vous pouvez troquer votre eau à prix d’or contre le travail des autres habitants. 
 
Mais vous pouvez également créer votre monnaie et ne vendre votre eau qu’en échange de votre monnaie.
 
Cela signifie que les autres habitants devront d’abord vous vendre leur travail à vos conditions avant de pouvoir acheter votre eau. Rapidement votre monnaie circulera entre les habitants et ainsi vous contrôlerez non seulement les échanges entre les habitants et vous mais également les échanges des habitants entre eux. 
 
Surtout, vous ne serez plus limités par vos ressources en eau. Vous n’aurez pas besoin de vendre plus d’eau pour vous enrichir mais simplement d’imprimer plus de votre monnaie.
 
Bien sûr, toute cette monnaie créée arbitrairement ne correspond à aucune valeur, aucun travail. Vous n’avez pas tiré plus d’eau de votre puit, vous n’avez pas travaillé dur pour creuser un second puit ou découvrir une seconde source. Cet argent que vous créez ex-nihilo n’apporte rien, il ne fait qu’augmenter la masse monétaire pour la même production de richesse. C’est-à-dire que vous ne devenez plus riche qu’à mesure que tous les autres deviennent plus pauvres.
 
C’est ce que l’on appelle un privilège exorbitant.
 
En étant prévoyant, vous utiliserez votre argent pour créer une police et lever une armée mais également des impôts. Votre monnaie aura cours légal, personne ne pourra la refuser à l’intérieur de votre aire d’influence qui deviendra votre royaume et vous pourrez asseoir votre pouvoir pour longtemps et bientôt tout le monde aura oublié l’origine de votre pouvoir. On pourra bien découvrir des centaines de sources d’eau cela n’y changera plus rien.
 
En revanche, si vous utilisez mal votre pouvoir, vous devrez faire face à d’innombrables jacqueries, grèves et multiples formes de résistance passive pouvant mener jusqu’à la guerre civile.
 
Car votre monnaie privée est devenue un bien commun, que vous le vouliez ou non.
 
Aujourd’hui les grands banquiers centraux et banques commerciales impriment de la monnaie par tombereaux sans aucune mesure avec l’activité économique. C’est ce qui est en train de tuer Deutsche Bank. Cet argent enrichit une infime minorité de milliardaires et centimillionnaires (néologisme pour parler de ceux qui ont un patrimoine de plus de 100 millions) et appauvrit tout le reste de la population.
 
Cet appauvrissement passe par :
  • la destruction de l’épargne qui est grignotée par une inflation supérieure à son rendement,
  • des calculs d’inflation douteux,
  • l’augmentation des prix de l’immobilier,
  • les hausses d’impôts,
  • le recul des services de l’État, santé, éducation, sécurité etc…
 
Le véhicule de ce gigantesque transfert est la monnaie. 
 
Peu importe que vous investissiez votre épargne dans un fonds euro, des actions, des obligations ou même de l’immobilier. Le problème fondamental n’est pas là. Il a été transféré par les banques centrales au niveau de la monnaie elle-même.
 
Repensez à la source d’eau. À long terme c’est dans le réel qu’il faut investir, le tangible. L’or physique, la terre, des biens de valeur, utiles, des actions de sociétés détenues en direct.
 
L’or en particulier est en train de repartir à la hausse. Il a augmenté de 20% depuis un an. Si vous n’en avez pas, c’est une assurance indispensable face au mal monétaire.
 
Plus largement, ce sont les relations avec nos entourages qu’il faut entretenir, retisser, l’entraide locale où chacun s’échange ses services de manière informelle et sans y mettre de prix. Un bricolage chez le voisin contre un panier de champignon la saison suivante. La garde des enfants contre un peu de jardinage… Il y a là une guerre larvée entre l’État qui veut donner une valeur financière à tout pour prendre sa taxe sur tous les échanges et ses administrés qui étouffent et se rebellent.
 
À votre bonne fortune,
 
Guy de La Fortelle
 
PS : Remplacez l’eau de l’exemple de cette lettre par l’accès aux données personnelles de 2 milliards de personnes et vous comprendrez aisément pourquoi Facebook est en train de créer sa propre monnaie et les perspectives d’un tel projet.

Partager l'article