Lisez ceci avec discernement

02 01 2020
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Mon cher lecteur,
 
Qui sont ces gens de chez BlackRock ?
 
On donne une Légion d’Honneur à l’un pendant qu’au gouvernement on s’empresse de vous faire passer votre chemin… Vous comprenez, la France est une toute petite boite de smarties pour BlackRock.
 
Il se trouve que c’est le sujet sur lequel je travaille en ce moment. Et cela pourrait bien être une grosse bombe.
 
Je pensais vous livrer le résultat de mon enquête une fois celle-ci terminée, mais nous allons faire un autrement. Aujourd’hui, je vous emmène dans les coulisses, au cœur de la formation d’une analyse, d’une idée et peut-être même pourrez-vous participer à l’ouvrage : c’est une montagne qui est devant nous, sans doute le cœur de la prochaine crise.
 
Vous me demandez souvent comment je trouve mes sujets et je réponds invariablement que je passe mon temps à NE PAS les chercher.
 
En l’occurrence, je vous attendais.
 
Je m’intéresse à BlackRock depuis un moment, et j’avais déjà écrit sur le sujet il y a 2 ans, si vous n’êtes pas familier avec ce géant de la finance, lisez ou relisez-le : https://www.investisseur-sans-costume.com/vous-connaissez-pas-larry/.
 
Mais il a fallu cette réforme des retraites et la preuve de l’ingérence de BlackRock dans la politique française pour attirer la lumière sur ce géant peu ordinaire et très ennuyeux au fond.
 
Un peu avant Noël, Bruno Bertez dont je suis le travail de près, annonça qu’il allait creuser sur BlackRock. J’ai trouvé l’idée bonne et me suis dit que nous ne serions pas trop de deux à regarder.
 
Nous avons échangé et Monsieur Bertez a publié aujourd’hui un premier papier reprenant un échange que nous avons eu ensemble.
 
C’était un document de travail, il n’est pas dégrossi, il manque de nombreuses précisions dont un pro comme Bertez n’a pas besoin, mais il n’y a pas de raison que vous n’y ayez pas accès vous aussi, tant que vous gardez en tête que ce N’est PAS un document définitif : il pose des questions sans apporter les réponses suffisantes.
 
Pour une fois cela vous permet de voir la quantité de travail que je mets dans mes lettres, y compris pour qu’elles aient l’air de couler de source et que cela ne se voit pas.
 
Ce document synthétise mes recherches sur l’actionnariat de BlackRock.
 
Les conclusions ne sont pas définitives mais les premiers éléments sont pour le moins déroutants et justifieraient que des armées de politiques, journalistes et analystes s’attaquent au problème publiquement.
 
Comme ils ne le font pas, ou si peu, ou si mal, il faut bien que nous le fassions nous-mêmes.
 
Je vous livre le texte brut, polémique, dans le sens grec d’ agiter, secouer, à lire avec attention et discernement :
 
Le principal actionnaire de BlackRock est PNC financial services, une banque régionale de Pittsburgh qui a racheté les parts de Blackstone dans Blackrock en 1994.
 
PNC est la banque partenaire de Vanguard pour offrir des services bancaires aux clients de Vanguard. Vanguard détient au moins 16% de PNC. Sans doute plus de 20 via la multitude de ses fonds (je n’ai pas eu le courage de tous les tracer).
 
Le 3e actionnaire de PNC est Wellington Management la société dont est issue Vanguard. Ils détiennent 5,5% de PNC. Mais il m’est difficile de savoir s’il y a collusion entre les 2.
 
Est-ce suffisant pour que Vanguard exerce le contrôle sur PNC ? Je tendrais à penser que oui, d’autant plus que Vanguard détient des positions dominantes chez presque tous les autres actionnaires.
 
Surtout, pourquoi Vanguard aurait des participations chez ses concurrents ?
 
Je ne parle pas des fonds mais de la société de gestion : pourquoi Vanguard Group détiendrait des parts dans BlackRock (5%), PNC (7%) et State Street (5%) ? Ils sont une société de gestion au comptant censés faire la gestion et la commercialisation des fonds qui les détiennent sans faire de bénéfices. Ils n’ont aucune raison de détenir ces parts et ne devraient même pas en avoir les moyens. Je n’arrive pas à trouver quoi que ce soit sur le sujet. Personne ne semble s’inquiéter de la structure capitalistique incestueuse de ces 3 groupes qui ont 20% de tous les droits de votes US. C’est dingue.   
 
S’il n’y avait pas ces participations, je pourrais croire que Vanguard s’est retrouvé en position dominante presque par hasard, simplement en faisant de l’ultra low cost efficace. Mais pourquoi ces participations ? Cela n’a pas de sens dans la belle histoire que Vanguard et Bogle nous racontent. Est-ce que cela aurait pu se passer après 2008 et Vanguard seraient-ils plus que BlackRock, les grands gagnants de la crise sortant leur épingle du jeu derrière la façade de BlackRock ?
 
En tout cas, si Vanguard contrôle PNC, cela fait boule de neige, alors ils contrôlent BlackRock et s’ils controlent BlackRock, ils controlent State Street soit 80% de l’asset management americain et 20% des droits de vote de toutes les actions americaines (et les 3 groupes votent sensiblement pareil).
 
Vanguard donc.
 
Je me suis intéressé à leur structure. Vanguard appartient à ses fonds, c’est-à-dire à son management. Les fonds de Vanguard sont dirigés par le même board de 7 trustees dont 6 « indépendants » et présidés par le CEO de Vanguard. Les actionnaires des fonds n’ont aucun droit, c’est un miroir aux alouettes, Vanguard n’est pas contrôlé par ses fonds. Quant au board…
 
Vous trouverez la liste des trustees de Vanguard ici p.36 (B28) :https://personal.vanguard.com/pub/Pdf/sai040.pdf?2210158603. Elle me semble assez ennuyeuse à part une ancienne de la Fed nommée en 2018 qui détonne dans le lot d’anciens de chez Xerox, IBM et universitaires chics. Cela en revanche me semble tout à fait inquiétant.
 
Il y aurait une autre hypothèse plus fantaisiste en lien avec Walter Morgan fondateur de Wellington dans les années 20 et sans qui Vanguard n’aurait pas pu être créé (il apporta le Wellington Fund à Vanguard) ni survivre et encore moins prospérer. Il n’y a pas de preuve en ce sens mais Morgan était issu d’une famille de Pennsylvanie remontant au XVIIe siècle et avait lancé le Wellington fund avec 100 000 dollars levé auprès d’hommes d’affaires de la région. Le Wellington fund est toujours chez Vanguard avec plus de 100 milliards sous gestion (mais encore géré par Wellington Management, tiens…), Morgan avait son bureau chez Vanguard jusqu’à sa mort en 98 et le bâtiment principal du siège est nommé en son honneur. Est-ce qu’il pourrait y avoir une courroie de transmission entre Vanguard et une sorte de classe affairiste de Pennsylvanie et plus généralement de la côte Est ? Je n’ai aucune indication en ce sens.
 
Excusez-moi pour ce long message. Je ne sais pas encore trop qu’en penser… Est-ce que cela vous inspire quoi que ce soit ? Je ne comprends pas pourquoi le sujet n’attire pas plus de lumière. Pourquoi personne ne s’interroge sur le rôle de Vanguard derrière BlackRock. Qu’est-ce que j’ai raté ?
 
Guy
 
Si cela vous a paru embrouillé, ne vous inquiétez pas, nous aurons l’occasion de revenir sur ce sujet crucial pour votre épargne.
 
En tout cas, ces éléments sont suffisamment probants pour rester au maximum en dehors des marchés boursiers…
 
 
À votre bonne fortune,
 
Guy de La Fortelle

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